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Hello les Robinson !3

11 Avril 2020 , Rédigé par AB Publié dans #Ecrits

Hello les Robinson !

 

   En ces temps de rationnement alimentaire, j’ai certes récupéré quelques tonneaux de biscuits de mer, de citrons et de choucroute (ces deux derniers pour lutter contre le scorbut, je tiens à conserver mon sourire hollywoodien) mais de verdure point !

Je sens venir le temps où je fantasmerai sur une accorte romaine ou sur une joufflue laitue. Les menues graines que j’ai trouvées au fond d’un petit coffre gardent encore leur mystère et il faudra attendre qu’elles lèvent pour percer leur secret.

  Le programme en attendant : sarcler la terre, la désherber, exposer le sol à la lumière et aux premiers rayons du printemps qui vont le réchauffer tout doucement.

Je soupire : « Les premières salades, ce n’est pas pour demain ! »

  Et là, l’extrémité des chaussures disparaissant dans le tas d’herbes, j’ai brusquement une illumination comme ces inspecteurs un peu lents qui trouvent soudain LA solution. « Mais c’est bien sûr ! La verdure comestible ne se limite pas à la salade ou à l’épinard ! Il y a aussi le pissenlit. » Et me voilà à couver du regard les petites rosettes extirpées à grand renfort de gouge à asperges (c’est fou ce qu’on peut trouver dans la cale d’un navire). Ah les amis, quelle récolte !

  Du fond de mon ADN de gens de peu surgissent des réminiscences de cueillettes vertes.

C’était ma grand-mère nîmoise qui partait ‘’faire de l’herbe pour les lapins’’ au bord des chemins de garrigue, en remontant tout simplement les coins de son tablier de grosse toile bleue. C’était aussi cette vieille femme que je guettais, petite, à la fenêtre et qui vendait ses récoltes sauvages en arpentant les rues de la ville et en chantant : « Ah mes poireaux de vigne et mes saladettes des champs... ». C’était enfin mon grand-père italien qui avait connu l’orphelinat et plusieurs guerres et pour qui, la cuisine en mode survie, n’avait pas de secret. En silence, il déposait parfois, sur notre table, un emballage de spaghetti dans lequel s’empilaient trois belles boules de verdure cuite et pressée. Je revois ses grandes mains de maçon s’écartant sur son trésor.

Ne riez pas ! On attribue la plupart du temps les bienfaits du régime méditerranéen à la place qu’y tient l’huile d’olive mais il est une autre théorie qui rend, cette fois-ci, justice aux verdures sauvages bourrées de vitamines et d’omégas 3 présentes dans ce régime.

   Parmi ces salades sauvages (ramassées autrefois partout), il y a bien sûr le pissenlit ! D’où nous vient la détestation actuelle du pissenlit ? Comment se fait-il qu’on l’aime aussi peu en fleurs sur nos pelouses et tellement en photos sur nos calendriers ? Aurions-nous été insidieusement formatés par le spectacle des terrains de rugby ou des prairies anglaises tondues par les moutons ? Que n’avons-nous la nostalgie des plantes messicoles qui accompagnaient les moissons et qui fleurissaient les tampons de notre enfance. Et que dire du sigle de Larousse où le pissenlit en graines dispense le savoir ‘’à tout vent’ ?

   Mais nous n’attendrons pas le stade de la graine-parachute pour inviter le pissenlit en cuisine

- Cru, il rejoindra dans le saladier lardons, croûtons et œuf mollet (à éviter lors d’un rendez-vous amoureux car difficile à manger gracieusement et je ne vous parle pas du sourire ponctué de vert qui s’ensuit !).

- Cuit et essoré (l’eau de cuisson est amère), il s’accommodera, haché, d’une petite sauce blanche parfumée à l’ail. Un œuf dur pourra lui tenir compagnie.

- Pour cuisiner les fleurs, prenez-les à peine ouvertes, ôtez la base renflée et rajoutez à des lardons en train de dorer. Ne lésinez pas sur la quantité de fleurs ! Versez ensuite dessus des œufs battus pour une omelette ensoleillée ou bien mélangez-les à du riz blanc. Les plus courageux (il s’agit de compter 365 fleurs) confectionneront la recette de la cramaillote (ou miel de pissenlit)… un délice !

  Bien entendu, il ne faut pas être allergique et ramasser le pissenlit dans des lieux exempts de pollution et de troupeaux (parasites). Et pour finir, j’adresse une pensée émue à mes petits élèves que ce mot faisait pouffer et comme ils avaient raison : entre autres vertus, le pissenlit est diurétique et s’appelait autrefois ‘’pisse-au-lit’’.

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