À toi l’ami de toujours

À toi l’ami de toujours, puis-je te dire que je te trouve changé ? Ma conception de l’amitié me pousse à te l’avouer. En toute franchise. C’est vrai, je ne te reconnais plus. Comme c’est curieux ! Que se passe-t-il ? Toi, l’intellectuel, qui connait tant de choses, intervenait pour approfondir nos discussions, nous éclairer en permanence, te voilà, souvent, très souvent, « ailleurs ». Là, avec nous, sans y être vraiment. Tu ne rebondis plus aussi fréquemment pour nous faire partager ton point de vue, ton analyse, ta synthèse. Que dois-je, moi, comprendre de ton comportement si inhabituel ? Je te l’accorde, tu reviens encore de temps en temps en notre compagnie. Cela me rassure. Provisoirement, dois-je ajouter car, bien vite, ton esprit -je le vois, je le perçois sans nul besoin que tu me le confirmes- s’enfuit, vagabonde, voyage plus loin. Tel un volcan en pleine activité, il bouillonne et tes pensées, comme les ondes scalaires que rien ne freine, n’arrête, atteignent sans nul doute les rivages souhaités. Les expressions de ton visage me le laissent supposer. Bien sûr, personne ne connaît vraiment autrui ; néanmoins, qu’il m’est aisé de voir ce qui est malgré tout visible ! Ne serait-ce pas un bonheur intérieur qui t’habiterait ? Plus, t’obnubilerait ? Encore plus, ne serais-tu pas accaparé, dévoré, complètement sous l’emprise d’une passion inhabituelle, peut-être même récente, nouvelle ? Parlants, révélateurs sont, du moins à mes yeux, certains de tes manèges, certaines de tes attitudes, certaines de tes escapades.

Oui, toi l’ami, dis-moi maintenant, ne serais-je pas dans le vrai ?